Nous vivons dans une ère où l’image manipulée constitue la norme, pub retouchée, effets spéciaux, et la technologie à portée de tous. Nous nous rappelons sans doute de l'épisode 1 de la série Black Mirror, dans lequel le 1er ministre britannique devait "avoir une relation sexuelle avec un cochon pour sauver la monarchie". Si dans la série, le 1er ministre est victime et doit réellement accomplir son ouvrage devant des caméras, sera-t-il possible de créer des "fakes" semblables et hyper réalistes, mettant en scène des personnalités dans des postures embarrassantes ? Après "les fake news", c’est le phénomène du Deepfake qui apparait au grand jour, sur les réseaux sociaux, sur Youtube, en employant des technologies qui permettent de falsifier des voix et d’altérer des vidéos.
Qu’est ce que le Deepfake ?
Le deep fake est un phénomène récent et ne trouve donc pas de définition pertinente. DeepFake est la combinaison du terme anglo-saxon "deep learning » qui fait référence à l’apprentissage profond de l’intelligence artificielle et du mot « fake ».
Pour être concret, à partir de logiciels s’appuyant sur l’AI, il est possible de transposer la tête de quelqu’un sur le corps de quelqu’un d’autre dans des vidéos. En fait on peut prendre la tête d’un homme politique et lui faire dire n’importe quoi. Ne nous méprenons pas, il ne s'agit pas d'un nouveau concept marketing pour remettre à la mode les montages grossiers ou autres potacheries digitales, la technologie «deepfake» permet de truquer les vidéos en modifiant de manière ultra réaliste, des poses, expressions faciales et autres gestuelles d'individus.
Cette vidéo, de l'ex président Obama (cliquez sur l'image pour voir la vidéo), réalisée par Jordan Peel, réalisateur du film Get Out , «Le président Trump est une grosse merde.» atteste du potentiel de duperie colossal et du risque politique qu'il créé. Drapeau américain en arrière-plan, Barack Obama s’adresse à ses compatriotes dans une courte vidéo. Le ton est solennel, le regard déterminé, les mouvements fluides… Sauf qu’il n’a, de fait, jamais prononcé cette phrase. Quelques secondes plus tard, Jordan Peele, le réalisateur de Get Out, tombe, en effet, les masques : c’est lui qui est derrière la supercherie. Depuis le début, la voix du réalisateur et ses gestes sont calibrés sur ceux de l’ancien président américain.
Réseaux sociaux, Deepfake et lycée une triangulation délicate
De l’avis d’experte en AI, il faut aujourd’hui 14 heures de données audio et visuelles et des jours de développement pour que le résultat soit réellement probant. Le DeepFake ne sera pas à la portée de tous les teenagers geek en mal de blagues potaches. Toutefois , "On peut imaginer, le jour où cette technologie sera vraiment à la portée de n’importe qui, ce que cela pourrait donner en termes de bruits de couloir dans un lycée, suite à la circulation d’une vidéo truquée, par exemple. On pourrait vraiment assister à des catastrophes." ajoute Sam Woolley de l'Oxford Internet Institute.
Le deep fake pornography
Un nouveau sous-genre a déjà vu le jour : "le deepfake pornography" consistant à détourner des scènes de films X et à y remplacer le visage des actrices par celui de personnalités connues comme Emma Watson ou Michelle Obama qui ont déjà eu droit à leur porn DeepFake. Récemment, un acteur majeur de "l'industrie" a même annoncé pouvoir insérer ses clients dans leurs vidéos favorites, accompagnés des actrices «de leur choix» ( nous vous laissons seul juge du bon goût de la démarche).
Un risque politique
Le concept même de preuve par l'image va t'il disparaitre ? Car faire la différence entre une vidéo "deepfakée" et une vidéo "authentique" deviendra de plus en complexe. Cependant, ce genre de montage étant intrinsèquement dans l'ADN du web et des réseaux sociaux, il est probable que nos regards s'éduquent et distinguent, de plus en plus, rapidement le vrai du faux, le probable, de l'improbable.
"just a question of education".
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