Kanye West ou la vie sans "like". #demetricator

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Devinette : Qui a écrit : «On devrait tous pouvoir utiliser les réseaux sans avoir à montrer combien de followers et likes on a. De la même manière qu’on peut masquer les commentaires, on devrait pouvoir masquer le nombre de followers. Cela a un impact très négatif sur l’estime de soi» ?.

Et bien non,  ce n''est ni Raphael Glucksman, ni Alain Finkelkraut, mais bel et bien Kanye West. Et bien oui, Kanye West, le vrai, le seul l'unique, le mari de Kim Kardashian. Le même qui paradait à la maison blanche casquette "make america great again" vissée sur la tête dans le bureau de Donald Trump! Et comble du paradoxe , le rappeur a la main lourde sur les réseaux sociaux : il est retweeté 46 000 fois et liké 211 000 fois. 

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 Kanye West & Kim Kardashian, défiants vis-à-vis des SN ?

 

Fort de son succès, et fermement décidé à changer le destin des réseaux sociaux, le rappeur américain décide d'adresser ses propos au patron de Twitter, Jack Dorsey, qui lui répond  «Nous avons réfléchi profondément au sujet des compteurs de followers et de likes, et ce que cela encourage. Nous voulons changer. Ce qui faisait sens il y a douze ans, ne marche plus aujourd’hui. Le fait que nous mettions en avant ces chiffres encourage les gens à les faire augmenter, et qu’ils se sentent mal si ce n’est pas le cas.»

 

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Jack Dorsey

Au delà de ces échanges "comédia dell arte version 3.0", il faut reconnaitre que la question mérite d'être posée et nous remercions le décidément facétieux Kanye, d'avoir ouvert le débat.

Ils sont là, partout, envahissants, stressants, parfois vexants parfois réjouissants voire carrément jouissifs pour certains. Les métriques sont la substance même des réseaux sociaux : nombre de likes, nombre de retweets ou de partages, nombre de messages non lus, nombre de notifications, nombre d’amis ou de followers, nombre de requêtes d'amis, etc. 

 

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En réalité, Kanye West est peut être mal informé, car l'outil qui permet d'éradiquer ces « métriques ».  existe bel et bien, comme le relevait l'excellent UZBEK&RICA . Son nom : « Demetricator ». Ben Grosser, artiste et chercheur, en est le créateur. Démétricator dispose d'une extension pour Twitter, Facebook, Instagram, qui s'installe en 1 minute. Une fois installée, vous naviguez dans un monde où plus personne n’est encouragé à écrire, partager, réagir, en quête d’un like ou d’un follower. Quand une conversation ou un débat s’engage, les arguments, commentaires, ne sont plus notés. 

 

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On sait combien la télévision a été pervertie par les mesures quotidiennes d’audience. A la façon d’un Cyril Hanouna électrisé par ses scores d'audience (et qui façonne ses quotidiennes par des Buzz, clashs pour assurer son audimat), l’internaute compulse sans cesse son nombre de likes, son nombre de vues, au sujet de contenus toujours plus banals : petit chat, grumpy cat, accident de voitures, chute sur la neige etc...  

 

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L’audience n’est en rien un critère de qualité. Nécessaires pour nourrir les algorithmes qui sélectionnent les contenus, les métriques contribuent à uniformiser les contenus. Aujourd'hui, les afficionados des réseaux sociaux ont parfaitement intégré les critères de «likabilité». Toutes les photos Instagram finissent par se ressembler. La vraie vie s’éloigne ainsi des réseaux, qui n’en reçoivent plus qu’une version filtrée, prête pour publication. 

 

aaronthompson_nathanjurgenson_2D'après Nathan Jurgensen, éditorialiste indépendant, spécialiste des réseaux sociaux, embauché par Snaptchat ( 1er réseau social sans like) : "l'hypothèse qui a été faite, c'est que les chiffres mesurent le comportement : quelqu'un dit quelque chose. Si c'est intéressant, les chiffres le montreront et inversement". il ajoute : "la réalité, c'est que tout le contenu existe pour satisfaire ces métriques... En un sens ces métriques deviennent la conversation" (uzbek & Rica)

Sean Parker, ex-président de Facebook, a reconnu que le réseau éponyme a été conçu comme une machine à sous, qui délivre à chaque like sa dose de dopamine et finit par nous rendre accro : "Cela vous pousse à contribuer de plus en plus et donc à recevoir de plus en plus de commentaires et de likes. C’est une boucle sans fin..." 

 

Ben Grosser va plus loin : « Voudrions-nous liker autant de publicités et de pages si on ne nous disait pas au préalable combien de personnes ont liké avant nous ? Voudrions-nous écrire autant de statuts si Facebook ne permettait pas de les liker ? En d’autres termes, l’accent mis sur la quantité nous conduit à mesurer continuellement la valeur de nos connections sociales en termes chiffrés, et ce point de vue chiffré n’est pas sans conséquences sur nos comportements. » 

 

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Ben Glosser

 

Nathan Jurgensen ajoute "les Américains ont tendance à tout penser autour de la productivité. C'est pour cela qu'ils aiment autant les réseaux sociaux où l'on peut tout noter".

Effectivement les startups sont accros aux métriques. Elles font partie de l'ADN de la startup. Les métriques sont désormais l'unité de définition du succès. On mesure les métriques dès le lancement d'un projet pour valider sa pertinence et ses perspectives de succès. On quantifie les métriques pour valider l'efficacité d'une campagne. La Silicon Valley a rendu le monde accroc aux métriques. Certes, nous, marketeurs,  pouvons nous en réjouir. Nos campagnes sont désormais "sourçables", les efforts de nos équipes peuvent être récompensés à leur juste (?) valeur. Nous pouvons même, enfin, définir des objectifs SMART* avec nos clients. Mais souhaitons-nous que la dictature du like ne conduise pas à un assèchement de nos campagnes et vers une uniformisation globale qui sonnerait le glas de nos métiers.  

 *Spécifiques, mesurables, réalisables, temporels

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